mercredi 26 juin 2013

Bip bip bip [bruit de douchette]

Anna Sam, Les tribulations d'une caissière, Albin Michel, 2012 [169 p.]

Mon résumé :
              
      Anna est hôtesse de caisse dans un supermarché. Depuis huit ans. Huit ans où elle aurait aimé être ailleurs. Huit années à endurer des conditions de travail difficiles et des clients pénibles.
  
Ce que j'en pense :
         
       Bof.
     
    Si j'ai compris, le récit est une adaptation de posts du blog qu'alimentait régulièrement Anna Sam. Et, en effet, l'écriture relève plus d'une compilation de chroniques que d'un récit en tant que tel. C'est dommage car il y a vraiment matière à roman. Mais, comme l'écriture et le regard font défaut, le livre fait plof.
    Le récit enchaîne les facilités pour faire sourire. Même si on plonge dans le métier et sommes atterrés par ses côtés inhumains et violents, ce qui m'a gênée est la férocité du regard porté sur les clients. Ce dernier est partisan et très peu nuancé. L'auteur se place en entomologiste implacable. Les critiques sont acerbes - même si parfois les attitudes le justifient. Je regrette que ce regard manque cruellement de bienveillance et d'empathie.
    En bref, un livre honnête qui sent vraiment le vécu et se lit d'une traite. Mais de là à le nommer roman...

Challenge :




lundi 24 juin 2013

Ci-gît...

David Grossman, Une femme fuyant l'annonce, Ed. Points, 2012 [792 p.]

 
Résumé :
                
      Le fils s'engage au combat. La mère entre alors dans un entre-deux : comment vivre sachant que son enfant va probablement mourir ? Ora décide alors de partir pour fuir l'impossible annonce.

  
Pourquoi j'ai abandonné :
         
        Parce que je n'ai d'abord rien compris. Le récit s'ouvre sur trois voix dans la pénombre. Tout s'éclaire des années et quelques centaines de page plus tard... Trop long pour moi.

      Parce que je n'ai pas été sensible au personnage d'Ora. D'abord touchée par son émotion de mère qui tente tout pour échapper à l'impossible annonce, j'ai eu du mal à la comprendre dans ses relations aux autres, dans le déroulé de ses pensées.
 
      Parce que je me suis ennuyée. La lecture est particulièrement longue et pénible.
     Du coup, après 145 pages, je me suis dit que malgré certaines critiques dithyrambiques qui crient au chef d'oeuvre, je n'avais pas envie de m'infliger ça.

     En bref, ceci est une non-chronique.



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dimanche 23 juin 2013

Au Bal des Apparences

Grégoire Delacourt, La première chose qu'on regarde, Edition JC Lattès, 2013 [263 p.]


Mon résumé :
         
             Long. Dans la Somme. On sonne à la porte d'Arthur Dreyfuss, 24 ans. Il ouvre et se retrouve nez à nez avec Scarlett Johansson. Enfin, pas tout à fait. Jeanine Foucamprez, 27 ans, une vie moins agréable et glamour que sa sosie...
  
Ce que j'en pense :
         
    C'est mauvais.

    J'ai d'abord trouvé l'écriture froide et moqueuse. Les passages dramatiques sont traités avec sarcasme. Les dialogues ne sont vraiment pas de haut vol – mention spéciale à celui en français baragouiné, je ne m'en remets toujours pas...
     L'inconvénient de ce ton sarcastique est qu'il met à distance les personnages. Je n'ai ainsi pas été en empathie avec eux.
On a, d'un côté, un jeune homme qui voit Jeanine/Scarlett comme un morceau de viande et se regarde sans cesse vivre – je vous passe le nombre incalculable de fois où il se demande ce qu'il doit faire avec Scarlett Johansson dans son salon... Pour rester dans son fantasme, il occulte tous les éléments qui peuvent le ramener à la réalité et, persiste, pour sa fierté, à voir Scarlett en Jeanine.
Notre héroïne n'est pas meilleure. Elle est en perpétuelle recherche d'identité et se fait passer pour ce qu'elle n'est pas afin de séduire et se faire aimer. Tout en se plaignant sans cesse qu'on ne la voit pas telle qu'elle est...
     Quand à l'intrigue...
   Je me suis d'abord demandée ce qui me gênait dans ce récit. Après réflexion, je pense que c'est son côté « ras-des-pâquerettes », bassement réel. L'auteur use de détails et de références contemporaines et enchaîne les épisodes sordides. C'est stéréotypé, superficiel et lourdingue.
    Au final, j'ai l'impression que Grégoire Delacourt écrit comme on filme, à force d'images et de raccourcis.
  En bref, je n'ai ni apprécié ni rêvé ni voyagé. J'espère que son précédent roman, La liste de mes envies, est plus réussi.
 
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samedi 22 juin 2013

A l'Oeil et à la Barbe

Amélie Nothomb, Barbe Bleue, Albin Michel, 2012 [169 p.] 



Mon résumé :
         
         Saturnine, 28 ans, répond à une annonce mirifique : une colocation dans un hôtel particulier du VIIème arrondissement de Paris pour une bouchée de pain. Les candidates sont nombreuses. Notre héroïne, seule intéressée par l'annonce et non mue par une curiosité macabre envers le mystérieux et charismatique propriétaire, est choisie. Le bail est cependant entaché par une terrible rumeur : les huit précédentes colocataires auraient disparu...
  
Ce que j'en pense :
         
        C'est ma première lecture d'Amélie Nothomb, et j'ai bien aimé.

       J'ai d'abord été attirée par le point de départ du récit qu'est la réécriture contemporaine du conte de Barbe bleue. On y retrouve les éléments clés : la richesse, l'avidité, l'importance des couleurs, les disparitions, la pièce interdite, etc.
Mais l'auteur parvient tout de même à nous emmener dans ce récit mariné à sa sauce, donnant au conte une autre dimension.
Elle nous livre deux personnages atypiques : le noble Elemirio et son côté fantasque confronté à la jeune Saturnine aux positions et à la morale affirmées.
La vivacité et l'humour de leurs échanges sont remarquables.

      La peinture d'une héroïne sûre de son fait est intéressante. Prévenue du danger que représente l'homme, Saturnine pense être plus forte et se lance dans l'histoire. Et, elle en devient aussi matérialiste que moralisatrice. La dichotomie des rôles est alors apaisée. Le Bien et le Mal s'affrontent verbalement mais, notre cœur balance. Et, je dois dire que j'ai été plutôt du côté d'Elemirio malgré ses actes terribles et ses raccourcis douteux pour les justifier.
     Amélie Nothomb n'échappe cependant pas à quelques faiblesses.
Le personnage de la copine fadasse censée mettre en valeur les deux protagonistes principaux m'a semblée facile.
J'ai été aussi un peu gênée par les explications qui pré-mâchent le récit. L'auteur parvient à nous faire comprendre les choses sans les dire, pourquoi alors sentir la nécessité de les expliciter ? Je pense notamment à la bascule de Saturnin, du recul à la fascination pour Elemirio : on la ressent facilement, nul besoin de la spécifier.
J'aurai ainsi aimé plus de non-dits...

     L'écriture est toutefois élégante. A mon point de vue, pas vraiment remarquable mais simple et efficace. La lecture est happante et plaisante. Ce qui est bien agréable.

     En bref, un court récit attirant et sans prétention.

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lundi 10 juin 2013

Au kibboutz

Amos Oz, Entre amis, Gallimard, 2012 [157 p.]


    J'ai bien aimé.
   L'atmosphère du kibboutz est calme et paisible, et c'est dans un silence ouaté que se débattent huit de ses membres avec leurs désarrois : l'étouffement et l'envie de liberté (Yotam Kalisch), le désir (Yoev Carni), la fatalité (Nahum Asherov), la solitude (Osnat), la mort (Martin Vandenberg)...
   Chacun d'entre eux participe à l'histoire générale, celle de la communauté, où malgré la promiscuité, on est seul.
   L'écriture est économe, juste. Pointent des traits d'ironie et d'humour. J'ai particulièrement aimé les remarques de Roni Schindlin sur chaque membre de la communauté qui traversent l'ensemble des nouvelles.
     La nouvelle qui reste pour moi la plus émouvante est « Un petit garçon » où le très jeune Youval (5 ans) persécuté par ses camarades bénéficie du soutien et de l'amour inconditionnels de son père.

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dimanche 2 juin 2013

Quand tout se finit

Laurent Gaudé, Pour seul cortège, Actes sud, 2012 [176 p.]



Mon résumé :
        
     Babylone. 323 avant J-C. Le grand Alexandre s'effondre en plein banquet. Après quelques jours d'agonie, il s'éteint. Vient alors le moment du périple tragique de sa dépouille et de son âme.
      
Ce que j'en pense :
 

  Je continue ma découverte de l’œuvre littéraire de Laurent Gaudé avec Pour seul cortège, son dernier roman.
 
    C'est toujours extrêmement bien écrit.

    Le récit est court - il se lit d'une traite - et fait s'alterner plusieurs voix – celles d'Alexandre, du sacrificiel Ericléops et de Dryptéis.

        Ce n'est pas tant la vie d'Alexandre qui est au cœur du récit que sa mort et son lent accompagnement vers le repos éternel. La grandeur de ce personnage historique se lit par sa légende qui plane et par les autres personnages, notamment à travers la voix d'Ericléops. Parce que, pour l'heure, le lecteur est face à un homme affaibli qui se meurt.

          L'attribution d'un rôle épique à un homme faible et agonisant m'a d'abord faite sourire. J'ai ensuite réalisé que le véritable héros de cette épopée n'était pas tant Alexandre que Dryptéis. Dryptéis qui a la force de renoncer à son fils pour le sauver. Dryptéis qui reste fidèle à Alexandre jusqu'au bout. Dryptéis qui accomplit la véritable action du récit : mener Alexandre à la paix et au repos éternel au péril de sa vie.
 
        Différentes scènes m'ont saisie : les adieux d'Alexandre, le périple du cortège des pleureuses, son attaque par les généraux, etc.
Et, même si l'intrigue m'a guère emportée, la beauté de l'écriture suffit à l'ensemble.
 
         J'ai sinon retrouvé de nombreuses parentés avec La Mort du roi Tsongor : le poids de l'héritage, l'orgueil destructeur, la femme sacrificielle, etc.

          En bref, un beau récit plaisant à lire.


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samedi 1 juin 2013

Tu seras un Homme, mon fils

Laurent Gaudé, La Mort du roi Tsongor, Actes sud, 2002 [204 p.]


Mon résumé :
         
         Samilia, fille du vieux roi Tsongor, s'apprête à s'unir à Kouame, riche et puissant jeune homme, auquel son père l'a promise. C'est sans compter sur le retour de Sango Kerim, avec lequel elle s'était engagée enfant, qui revient chercher son dû. Le vieux roi doit alors faire un impossible choix. Auquel d'entre eux doit-il livrer la belle Samilia ?
  

Ce que j'en pense :
         
         C'est seulement le deuxième livre de Laurent Gaudé que je découvre, et il m'a transportée dans un tout autre univers qu'Ouragan.


        Nous sommes plongés dans le royaume d'un conquérant aussi efficace que sanguinaire, le roi Tsongor, au cœur d'une Afrique peuplée de tribus singulières.

     J'ai été immédiatement transportée dans cette atmosphère mi-historique mi-onirique.


     Je me suis sentie concerner par le désarroi du vieux roi face à ce dilemme initial - j'ai compris son geste et entendu sa souffrance. Être impuissant face aux morts successives de sa ville, de son peuple et de sa famille, pour un roi conquérant, n'est-ce pas la pire des malédictions ? En laissant la main, il s'inflige la pire des souffrances.


     J'ai accompagné Souba dans son voyage initiatique à travers le royaume et sur les traces de son père. Son renoncement à sa vie pour honorer la mémoire de Tsongor lui permet de rester en vie et de trouver son propre royaume.


     J'ai été émue par la fidélité de Katabolonga.


     Je n'ai pas toujours compris Samilia qui se refuse à choisir, mais dont les actions ont des répercussions extrêmes.


     J'ai été saisie par l'orgueil et la vanité des hommes qui mènent à la consciente destruction d'un royaume et de vies entières – Samilia en est l'exemple magnifique.


     J'ai aimé l'alternance entre le silence de la quête de Souba et l'agitation et la fureur de la guerre qui ronge Massaba.


     J'ai réfléchi au poids de l'héritage. A ce que l'on porte malgré nous. A ce que l'on perd malgré nous.


     Enfin, j'ai été portée par la finesse, la fluidité et la puissance de l'écriture de Laurent Gaudé.


     En bref, un fort beau récit poétique.


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