dimanche 11 mai 2014

Sous le soleil de méditerranée

Philippe BESSON, De là, on voit la mer, Julliard, 2013 [204 p.]


 
Mon résumé : 
         
        Louise est écrivain et part chercher la tranquillité et la solitude en Italie pour rédiger son prochain roman. Dans la chaleur de l’automne, elle y croise Luca, de vingt ans son cadet, qui deviendra son amant.
 
Ce que j'en pense :
               
        J’ai beaucoup aimé.

      Ce récit sensible et touchant traite autant du processus de création que de la fin d’un amour et du début d’un autre. On y perçoit la vie qui (inter)agit sur l’écriture de l’œuvre en cours.

     L’écriture est belle, sans fioritures. Philippe Besson a une attention particulière à la langue et au rythme. Le récit oscille entre ralentis - lenteur du processus d'écriture et des corps-à-corps des amants - et accélérés. Tout cela coupé net par le coup de fil qui annonce l'accident de François, le mari de Louise.

     On est pourtant prévenu dès la sentence initiale : la pesanteur zénithale du soleil d’Italie en jette quelques-uns dans la folie. Est-ce une folie de Louise que de se laisser porter par son corps dans cette aventure ? Peut-être pas tout à fait, car le cœur ne tarde pas à suivre : " A quoi reconnaît-on qu'on est amoureux ? A la morsure du manque ? Au besoin d'être avec l'autre, plus souvent que le temps imparti ? A la pensée qui vagabonde ? Au seul fait qu'on se pose la question ? Depuis combien d'années ne s'est-elle pas posée la question ? " (p.166)
 

    Tout est écrit dans cette scène d'ouverture où l'été méditerranéen, sa torpeur et son silence, sont très justement décrits.

    L’atmosphère installée, Philippe Besson nous place dans la peau de Louise, une femme qui a mis l'écriture au cœur de sa vie. Pour autant sa communication passe assez peu par les mots. Ces derniers ne seront employés que dans la confrontation avec son mari où les paroles sont des flèches servant un combat déjà joué.

    Le récit est surtout le discours des silences. Des silences chargés, violents parfois. Où ce que l'on tait passe par les gestes et les expressions. Les descriptions de ces silences sont ainsi très belles.

    Louise fuit François. Elle le fuit, le laissant seul dans le quotidien pour écrire son livre, seul dans sa convalescence pour vivre sa passion et ne pas affronter sa douleur et sa souffrance.

    L'histoire racontée est d'ailleurs hautement cinématographique - le récit est en actes, les chapitres sont des scènes, le décor et l'atmosphère sont posés dès l’ouverture, les ellipses temporelles font avancer le récit, les entrées des personnages sont travaillées – le jeune homme est comme précipité dans la vie de Louise, François prend corps par son accident, etc.

    Le créateur tire les ficelles : «  Sur la plage, un sac plastique est entraîné par le vent, il roule, interrompt sa course folle et la reprend, soulevé à nouveau, balloté, il virevolte, monte haut et chute lourdement, avance précipitamment puis recule brièvement, semble la proie d’un esprit facétieux ou dément.  » [p.48]

    En bref, un livre émouvant, juste et beau.

Extrait que je retiens :
 
" Ce serait plus simple s'il s'agissait seulement d'un adultère. Plus simple que la fin d'un amour, le commencement d'un autre." (p.167)

       
Musique :