mardi 30 décembre 2014

" Pourquoi faut-il que tu me regardes uniquement lorsque je me ressemble si peu ? "...

Clara Dupont-Monod, Le roi disait que j'étais diable, Grasset, 2014 [236 p.]


Mon résumé :


     « Le roi disait que j’étais diable ». Diable la jeune Aliénor d’Aquitaine l’est bien pour le pauvre Louis VII. Son frère mort, le voilà à la tête du royaume de France. Le voilà homme de décision alors qu’il est homme de prière ; le voilà marié alors qu’il est homme de Dieu. Mais, la vie est encore plus diabolique. Le jeune roi s’éprend sincèrement d’Aliénor. Aliénor, femme du Sud - femme de chair et de conquêtes. Tout cela ne peut que mal finir...

Ce que j'en pense :

      Le dernier roman de la journaliste et écrivain Clara Dupont-Monod dessine habilement les portraits d’une femme intraitable et insoumise, et d’un homme amoureux et rejeté. Deux voix qui s’alternent sans jamais se mêler. Deux êtres qui se côtoient sans jamais partager. Même une troisième voix - celle de Raymond d’Antioche - ne parviendra à les réunir. Pire, elle se fera le terrible écho de leurs dissonances. Car la fin ne serait si tragique s’il ne s’agissait de souverains. Car les tourments intimes retentissent forcément sur l’Histoire de France…

     On éprouve durant cette lecture la pureté et la détresse de Louis. On ressent la sensation d’étrangeté d’Aliénor, parachutée dans une province et des coutumes qui ne sont siennes. Mais, ce n’est pas tant le portrait de deux personnages historiques que l’on suit, que le récit d’un amour impossible. « La Bible dit que l’amour grandit et rend heureux. Mais que faire quand il abaisse et fait couler les larmes ? » (p.140). La réponse le roi la détient. Mais c’est Aliénor qui la prend en fin d’ouvrage, partant vers une autre destinée…
 

     En Louis résonneront désormais les mots de ces troubadours qu’il aimait si peu : « Hélas d’amour je n’ai gagné / Que des tortures et des angoisses / Mon désir s’élance vers vous / Mais il ne peut pas vous atteindre / Et rien ne me fait plus envie / Que ce qui s’éloigne de moi » (p.233). Implacable résumé de ses années auprès d’Aliénor…
Merci à Price Minister de m’avoir gracieusement fait parvenir cet ouvrage dans le cadre des Matchs de la Rentrée Littéraire 2014

 
Musique :


lundi 3 novembre 2014

Et tu chantes, chantes, chantes...

Pénélope Bagieu et Joann Sfar, Stars of the stars : volume 1, Gallimard, 2013 [48 p.]



Ce que j'en pense :

     J'ai aimé le Chat du rabbin. J'ai aimé Joséphine. C'est donc avec une vive curiosité que je voulais voir la collusion de ces deux univers. Et... c'est totalement foutraque et déjanté !

     L'idée de départ est extra : la Terre étant en plein milieu de grandes routes commerciales, les extraterrestres, espèce plus évoluée et policée que celle des humains, décident de la rayer de la carte de l'Univers. Comme un de leurs grands pontes est féru de chant et de danse, ils décident auparavant d'en exfiltrer les meilleurs spécimens. Les voilà donc embarqués avec sept représentantes du genre humain. Et, on peut dire que le choix est plutôt gratiné !

      Entre, notamment, Angoissette, la rousse névrosée, Maurisse, la française agressive, Bonnie Princess, la punk violente, et Berthillone de Sabayon, l'autrichienne pleureuse, l'entente est loin d'être cordiale…

     Ce premier tome installe surtout le cadre du récit et nous place face aux pires défauts de l'espèce humaine. Les dessins, dynamiques et colorés, adoucissent la violence de l’intrigue et la férocité des propos.

     J'avoue être restée dans l'entre-deux. L'univers décalé et les répliques qui réveillent m'attirent  et me font réagir, mais le récit me laisse sur ma faim. J'attends de lire la suite pour adhérer... ou pas.


Musique :



Challenges :



dimanche 2 novembre 2014

Drôle de vie

Pénélope Bagieu, Ma vie est tout à fait fascinante, Delcourt, 2012 [91 p.]



Mon résumé  :

     Lumière sur le quotidien d’une jeune trentenaire.

Ce que j'en pense :

     J'adore.

     La vivacité, la rondeur et les couleurs des dessins m'attirent l’œil. Sans compter qu’ils complètent judicieusement (et sans redondance) les titres et les bulles.

     J’aime particulièrement le regard que porte Pénélope Bagieu sur sa – la - vie. Elle a un réel talent pour mettre en scène avec beaucoup d'humour de petites anecdotes du quotidien - anecdotes qui, de prime abord, sont insignifiantes, mais, qui, sous ses crayons et sa plume, se révèlent être tout à fait fascinantes.

     Enfin, je me reconnais pleinement dans le personnage : sa tendance à la procrastination, sa relation avec sa mère, aux hommes, etc. Et, j'apprécie sa savoureuse autodérision.

     En bref, une parenthèse souriante à lire sans modération.
  


Musique :


Challenges :



samedi 25 octobre 2014

Autopsie d'un best-seller

Joël Dicker, La Vérité sur l'Affaire Harry Québert, Ed. de Fallois, 2012 [665 p.]


 
Mon résumé :

     Aurora. 2008. Harry Quebert, grand écrivain américain, est accusé, trente ans après les faits, de l'assassinat de Nola Kellergan, 15 ans. Marcus Goldman, son élève et fidèle ami, jeune écrivain à succès en quête d'inspiration, se lance à corps perdu dans sa défense.


Ce que j'en pense :
         
Un pavé que je n'ai pas lâché.
J'ai aimé les trente leçons sur la vie et l'écriture qui reflètent le contenu de chacun des chapitres.
J'ai aimé la complicité entre Marcus et Perry Gahalawood, chef de police - tous deux en quête d'une seule chose, la vérité.
J'ai aimé la fluidité et la maîtrise de l'écriture.
J'ai aimé l'intrigue et ses nombreux rebondissements. J'ai aimé être baladée par l'auteur dans ma recherche de suspects. Les soupçons se font et se défont.
J'ai aimé l'humanité des personnages, leurs forces et leurs fêlures.
J'ai aimé la peinture d'une petite ville américaine.
En bref, un roman agréable qui n'échappe pas aux clichés du genre mais qui se lit volontiers.

 
 
Musique :



Challenge :

jeudi 28 août 2014

Le souffle des sentiments

Bergsveinn BIRGISSON, La Lettre à Helga, Zulma, 2013 [130 p.]


 
Mon résumé : 
         
         A la fin de sa vie un homme écrit une longue lettre à la femme qu'il a toujours aimé et laissé partir, revenant ainsi sur sa vie et les réalités de la campagne islandaise.
Ce que j'en pense :
               
      Saisissant.
       Le récit se lit d'un souffle. Bergsveinn Birgisson nous donne à entendre le monologue d'un vieil éleveur de moutons qui a laissé filer son amour, choisissant campagne, labeur et héritage familial.
       Bjarni aime les mots, la lecture et la poésie. Il est droit. C'est de manière frontale qu'il regarde sa vie grandir au loin. Sans lui. Assumant son choix, le choix d'Helga. Assumant l'impossible réalité d'un amour interrompu mais qui n'a jamais cessé, d'un désir assouvi mais d'un amour partagé qui n'a pu s'épanouir.
         L'écriture est authentique et crue. Elle nous plonge dans l'Islande des campagnes. Où aller chercher le cadavre d'une femme est une aventure source de comique et de poésie. Où la palpation d'un agneau est l'écho d'une scène puissante de désir (là, je passe sous silence la scène intime avec l'agnelle, nettement plus sordide...). Ce n'est qu'au bord de la tombe que la réalité peut éclater, que les mots redonnent vie aux sentiments. C'est ténu et émouvant.
         En bref, un bel hommage au désir et à l'amour.
Extrait que je retiens :
 
« J'ai (…) compris que l'être humain peut faire de grands rêves sur un petit oreiller ».

       
Musique :



dimanche 11 mai 2014

Sous le soleil de méditerranée

Philippe BESSON, De là, on voit la mer, Julliard, 2013 [204 p.]


 
Mon résumé : 
         
        Louise est écrivain et part chercher la tranquillité et la solitude en Italie pour rédiger son prochain roman. Dans la chaleur de l’automne, elle y croise Luca, de vingt ans son cadet, qui deviendra son amant.
 
Ce que j'en pense :
               
        J’ai beaucoup aimé.

      Ce récit sensible et touchant traite autant du processus de création que de la fin d’un amour et du début d’un autre. On y perçoit la vie qui (inter)agit sur l’écriture de l’œuvre en cours.

     L’écriture est belle, sans fioritures. Philippe Besson a une attention particulière à la langue et au rythme. Le récit oscille entre ralentis - lenteur du processus d'écriture et des corps-à-corps des amants - et accélérés. Tout cela coupé net par le coup de fil qui annonce l'accident de François, le mari de Louise.

     On est pourtant prévenu dès la sentence initiale : la pesanteur zénithale du soleil d’Italie en jette quelques-uns dans la folie. Est-ce une folie de Louise que de se laisser porter par son corps dans cette aventure ? Peut-être pas tout à fait, car le cœur ne tarde pas à suivre : " A quoi reconnaît-on qu'on est amoureux ? A la morsure du manque ? Au besoin d'être avec l'autre, plus souvent que le temps imparti ? A la pensée qui vagabonde ? Au seul fait qu'on se pose la question ? Depuis combien d'années ne s'est-elle pas posée la question ? " (p.166)
 

    Tout est écrit dans cette scène d'ouverture où l'été méditerranéen, sa torpeur et son silence, sont très justement décrits.

    L’atmosphère installée, Philippe Besson nous place dans la peau de Louise, une femme qui a mis l'écriture au cœur de sa vie. Pour autant sa communication passe assez peu par les mots. Ces derniers ne seront employés que dans la confrontation avec son mari où les paroles sont des flèches servant un combat déjà joué.

    Le récit est surtout le discours des silences. Des silences chargés, violents parfois. Où ce que l'on tait passe par les gestes et les expressions. Les descriptions de ces silences sont ainsi très belles.

    Louise fuit François. Elle le fuit, le laissant seul dans le quotidien pour écrire son livre, seul dans sa convalescence pour vivre sa passion et ne pas affronter sa douleur et sa souffrance.

    L'histoire racontée est d'ailleurs hautement cinématographique - le récit est en actes, les chapitres sont des scènes, le décor et l'atmosphère sont posés dès l’ouverture, les ellipses temporelles font avancer le récit, les entrées des personnages sont travaillées – le jeune homme est comme précipité dans la vie de Louise, François prend corps par son accident, etc.

    Le créateur tire les ficelles : «  Sur la plage, un sac plastique est entraîné par le vent, il roule, interrompt sa course folle et la reprend, soulevé à nouveau, balloté, il virevolte, monte haut et chute lourdement, avance précipitamment puis recule brièvement, semble la proie d’un esprit facétieux ou dément.  » [p.48]

    En bref, un livre émouvant, juste et beau.

Extrait que je retiens :
 
" Ce serait plus simple s'il s'agissait seulement d'un adultère. Plus simple que la fin d'un amour, le commencement d'un autre." (p.167)

       
Musique :



dimanche 27 avril 2014

Ras-la-couronne

Meg CABOT, Journal d'une princesse. Tome 01 : la grande nouvelle, Le Livre de Poche Jeunesse, 2008 [280 p.]



Mon résumé :
           
             Mia, 14 ans, est une jeune adolescente plutôt banale. Amoureuse du garçon le plus sexy du lycée, elle partage son temps libre entre sa meilleure amie Lilly et ses cours de soutien en maths. Son quotidien est bouleversé le jour où elle apprend qu'elle est l'unique héritière d'un petit royaume, Genovia, et qu'elle va devoir endosser le rôle de princesse.
  
Ce que j'en pense :
               
            C'est un livre agréable qui mêle amour, amitié, rebondissements, gags et déceptions adolescentes.

        J'ai aimé l'écriture directe et sans fioritures de Meg Cabot. Elle nous transporte rapidement dans la tête de notre jeune adolescente, autant préoccupée par le fait que sa mère fricote avec son professeur de maths que par ses futures charges de princesse.

        Le choix du journal intime est plutôt malin. La narration s'en trouve rythmée et nous place immédiatement au côté de Mia. Notre héroïne n'est ni particulièrement belle ni sensiblement intelligente ou indéniablement gentille, elle est juste une adolescente banale, drôle, tendre et sympathique, emplie de convictions plus ou moins ancrées. Le regard qu'elle porte sur le monde est vraisemblable et drôle.
Alors que dans les contes de fées, les jeunes filles rêvent de devenir princesse, Meg Cabot prend le contre-pied et peint une héroïne qui, elle, souhaite être une jeune fille banale et de se fondre dans la masse comme la majorité des adolescentes.

        J'avoue avoir eu peur que l’ouvrage ne me tombe des mains, mais je me suis trompée. Je reste tout de même réservée sur les nombreuses références qui commencent à être doucement datées, et que les jeunes lecteurs d'aujourd'hui ne doivent pas toujours saisir.

        En bref, c'est une lecture agréable, sans prétention, qui, j'en suis quasi certaine, va enchanter pas mal d'élèves !



       
Musique :




Challenge :